Article Paru dans Inexploré numéro 38 printemps 2018
Se soigner avec les arbres
Le Shirin Yoku au Japon ou Sylvothérapie,
est une méthode à la fois récente et ancestrale, de soin par les arbres.
Reconnecter avec la nature, s’imprégner de la forêt, permettrait à nos corps et
nos esprits de se ressourcer en profondeur.
« Nous allons mieux quand nous sommes au contact avec la nature »
explique Yoshifumi Miyazaki chercheur de l’université de Chiba à Tokyo,
spécialiste du Shirin Yoku, ou « bains d’arbres » cette méthode
entérinée par ses nombreuses recherches sur les effets de la nature sur la
santé. Il est vrai que de tout temps l’homme s’est associé à l’arbre, pour son
habitat, pour le bois du feu, pour s’abriter ou ne serait-ce que pour respirer.
L’homme inhale l’oxygène que l’arbre diffuse et l’arbre absorbe le CO2 que
l’homme exhale. La réciprocité commence déjà par un lien de vie très fort entre
les deux. Mais il semblerait qu’au-delà des relations d’utilité immédiate,
l’arbre et l’humain aurait beaucoup plus à échanger. Les chamans l’ont bien
compris et les tribus traditionnelles se sont toujours entourées de l’esprit
des arbres ou des plantes pour se soigner. Il existe ainsi plusieurs méthodes
accessibles à tous pour bénéficier d’une connexion qui noue ou renoue notre
corps et notre âme avec les poumons de la Terre.
Se détendre, saluer, respirer
C’est la première sensation que la plupart d’entre nous tentons
d’obtenir en se promenant en forêt : une détente, un « changement
d’air ». En effet le vent, le balancement des feuilles et des branches,
les odeurs, la verdure provoquent un bien-être quasi immédiat pour peu que l’on
arrive à débrancher le mental et nos téléphones portables ! Jean-Marie
Defossez recommande la sylvothérapie-détente, le premier stade d’apprivoisement
de la méthode de soin par les arbres. Plusieurs exercices sont pratiquables
comme celui du salut à l’arbre. Il s’agit d’en choisir un et de s’en
rapprocher, cet exercice peut également se faire en ville « quel que
soit l’arbre qui vous attire, allez vers lui. Allez le saluer, lui souhaiter le
bonjour et, sans le juger, observez ce qui, dans la vie, vous a conduit à le
rencontrer. » Dans cette idée, l’arbre peut dire quelque chose de nous,
et par miroir ou par sympathie, être le reflet d’un message. Nous pouvons le
regarder comme un être à part entière et ensuite lui dire au revoir. Il est
possible aussi de se mélanger à l’arbre en pratiquant le « câlin » en
demandant mentalement l’autorisation. « Lorsque j’ai le cafard, je
choisis un arbre et lui fait un câlin en lui confiant mes secrets,
immédiatement j’ai la sensation d’être écoutée » confie Nathalie,
herboriste. Tous ces processus d’approches, sont autant de premiers pas vers un
échange énergétique. Nous utilisons nos cinq sens, nous déployons tout notre
potentiel sensoriel en écoutant, respirant, touchant, regardant… Autant de petites connexions qui
ressourcent par mimétisme et redonnent force à notre organisme. Avec la
respiration sylvique, Jean-Marie Defossez conseille, après avoir choisi un
arbre et l’avoir salué, de s’asseoir près de lui, de s’imaginer arbre à notre
tour. Notre respiration doit être vaste et profonde, « inspirez en
ouvrant au maximum le bas du thorax, expirez avec le ventre en gardant le bas
du thorax ouvert » explique notre expert. Selon lui les bienfaits sont
au-delà du simple bien être mais un premier pas vers une dimension plus
spirituelle.
Un pas vers la guérison
Yoshifumi Miyazaki a conduit de nombreuses études scientifiques auprès
de diverses populations. Il a constaté que les bains de forêt avaient comme
premier bénéfice de réguler la pression artérielle. Les personnes qui ont une
tension basse la voient remonter et inversement, celles qui ont une tension
trop haute, constatent sa baisse. Les effets sur le stress et l’anxiété ont
également été observés par la chercheuse Ming Kuo de l’université de Chicago,
comme l’explique M. Amos Clifford expert américain de la thérapie forestière
« Les bains de forêt stimulent considérablement le système immunitaire.
Le nombre de cellules tueuses naturelles (lymphocytes NK), qui s’en prennent
aux cellules cancéreuses et aux pathogènes nocifs, augmente après un bain de
forêt et les répercussions de ce seul effet sur notre corps sont nombreuses. »
Selon lui, les capacités d’auto-guérison de notre corps sont totalement
renforcées lorsque nous sommes en état d’équilibre, ce que le contact avec la
nature nous apporte. Yoshifumi Miyazaki a également étudié les effets directs
de la thérapie par la forêt et mis en évidence que les sujets ressentaient une
relaxation profonde grâce à une augmentation de l’activité du système nerveux
parasympathique, et une réduction du stress grâce à une réduction de l’activité
du système nerveux sympathique. Selon lui « la nature est en elle-même
un véritable médecin et elle réduit le stress parce qu’elle produit une
synchronisation des rythmes entre l’humain et elle ». M. Amos Clifford
reprend cette idée en expliquant que cet équilibre est aussi à l’origine de
l’adaptation de l’humain à son environnement : « Il faut se
rappeler que l’espèce humaine a vécu dans la nature pendant plus de 99 %
de son histoire. La structure en deux parties de notre système nerveux – le
système nerveux parasympathique et le système nerveux sympathique – a contribué
à notre adaptation à cet environnement naturel. » La variabilité de
notre fréquence cardiaque est héritée de cette genèse, il est donc logique
qu’en renouant avec la nature, l’humain se rapproche de ce qui a façonné son
fonctionnement.
Les essences comme essence
Lorsque nous nous approchons d’un arbre et que nous l’observons, nous
rentrons en résonance avec lui. Gérard Grenet, chaman guérisseur et instructeur
conseille également de chercher l’aura de l’arbre à la baguette de sourcier ou
juste en approchant les mains. Ainsi nous entrons dans son champ d’énergie et
bénéficions de sa force bienfaisante (voir encadré « vivez
l’arbre »). Cette énergiepeut fournir ce Jean-Marie Defossez nomme un
« soin sylvique » si nous en ressentons le besoin grâce à la
fréquence vibratoire. Il en a fait l’expérience lui-même en guérissant un mal
de dos grâce à un palmier qui lui avait « intuitivement » soufflé
avoir ce pouvoir « je me rapprochais au maximum de ce palmier, mon dos
tourné vers lui. […] trois minutes plus tard, toujours avec cette manière de
communiquer sans les mots je reçus l’information que le “soin” était fini.
Incrédule je fis onduler ma colonne doucement et je n’en revins pas : mes
muscles étaient encore crispés mais la douleur s’était envolée ! ».
Les huiles essentielles issues des arbres nous atteignent lorsque nous
nous promenons dans la forêt et leurs vertus thérapeutiques agissent
directement. Et lorsque l’on rentre chez soi ou en ville, les huiles en fioles
prolongent les effets naturels des arbres (voir article olfactothérapie p. 100).
Nous sommes également en contact avec les phytoncides, des composés qui aident
les arbres à se défendre des agressions extérieures et qui font réagir notre
propre système immunitaire en le stimulant.
Le réveil de nos intuitions
Après avoir régénéré le corps, retrouvé l’énergie, le contact avec la
forêt ouvre des portes bien plus grandes sur un univers intérieur connecté à
son environnement. En effet si nous nous laissons pénétrer par l’immensité de
la nature, nous pouvons développer des qualités intuitives, inspirées,
créatives. Au-delà du végétal tout peut entrer en communication avec
nous : l’eau, l’air, les pierres, le ciel, la terre. Dans cette démarche
de porter son attention sur le moment présent et sur ce qui nous entoure, nous
nous approchons d’une pratique méditative de pleine conscience et le bain de
forêt devient une méditation. De même la sensorialité
devient sensualité et intimité, comme le suggère M. Amos Clifford, c’est elle
qui nous relie au monde qui nous entoure et qui s’étend au-delà de nous :
« Trouvez un arbre et mettez tous vos sens en alerte. Commencez par le
regarder et dites : “À l’extérieur, je vois… ; à l’intérieur, je
sens…”, recommencez avec les autres sens. » De la même manière Jean-Marie
Defossez conseille de pratiquer la respiration sylvique au contact d’un arbre
et de tenter de rêver éveiller, de suivre ce que son esprit pourrait nous
raconter. À la manière d’une méditation, qui mène à la spiritualité,
l’arbre peut, si nous souhaitons le suivre, nous mener à des dimensions cachées
et insoupçonnées qui pourront changer notre regard sur le monde et peut-être
une partie de nous-mêmes. Et aujourd’hui c’est presque un acte « responsable
» que de restaurer les relations dégradées entre l’humain et la nature.
Vivez l’arbre, exemple de connexion
Conseil pour entrer en contact avec un arbre par Gérard Grenet
chaman :
1. Commencez toujours par demander l’autorisation, intérieurement, à entrer
en contact avec le végétal. Attendez ensuite, au creux de votre plexus solaire
la réponse d’accord qui se traduit par une émotion douce et agréable.
2. Frottez vos mains l’une contre l’autre afin d’activer leur sensibilité, approchez-les
ensuite, de chaque côté du végétal : un échange vibratoire s’installe, vos
mains chauffent ou enregistrent des picotements, vos énergies respectives
communiquent et s’échangent.
3. En pleine conscience de la vivance de vos cinq sens en action, mobilisez
le visuel, l’olfactif, le tactile, l’auditif et le gustatif.
4. Bientôt, vous résonnez complètement avec lui, la circulation de sa sève
se superpose, dans vos ressentis, à la circulation de votre sang. Vos pieds
libèrent leurs racines qui s’engouffrent en terre, dans le monde d’en bas, vos
cheveux captent la lumière du Ciel, du monde d’en haut.
5. L’arbre et vous, reliés, échangez un cérémonial de simple amour : vous
pouvez l’enlacer, le cajoler ou vous asseoir dos contre lui. Vous pouvez lui
poser vos questions ou déposer vos souhaits. Sa réponse fait écho dans votre
poitrine, vibre dans votre abdomen et vous transmet un mot-clé, une émotion,
une image ou une idée nouvelle, toute fraîchement générée par la sagesse de
votre binôme végétal-humain !
6. Accueillez ce qui vient vers vous. Ce message transmis par le vivant
demeure toujours l’information essentielle qui vous manquait, même si elle ne
semble pas inhérente à la question initialement posée.
7. Prenez un temps de recueillement, d’intégration.
8. Quittez votre compagnon en prenant soin de le remercier et de sortir de
sa bulle énergétique, de son intimité vibratoire, de sa zone de confort, par
cette même porte, matérialisée au sol au préalable lors de votre repérage.
Vous
aussi vous êtes chaman, Gérard Grenet, Ed.
Leduc.s, 2018,
A LIRE
Sylvothérapie, le pouvoir bienfaisant des
arbres, Jean-Marie Defossez, Éd. Jouvence, 2018, 15,90 €
Shirin Yoku, les bains de forêt, Yoshifumi Miyazaki, Éd. Guy Trédaniel, 2018, 18 €
Le livre des bains de forêt, M. Amos Clifford, Éd. Guy Trédaniel, 2018, 17 €
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